Trotula de Salerne


XIème siècle

Salerne, Italie

Médecine, chirurgie, gynécologie, cosmétique.


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Trotula de Salerne


Trotula de Salerne fut une femme médecin et chirurgien au Moyen Âge. Elle étudia à l'École de médecine de Salerne, puis y fut enseignante et praticienne au dispensaire attenant où l'on soignait de riches Italiens, des Croisés de retour d'Orient, des étrangers venus de toutes parts. Plusieurs ouvrages traitant de médecine des femmes lui sont attribués, dont Les Maladies des femmes, Traitements pour les femmes, et Soins cosmétiques pour les femmes. Écrit en latin, il devient l'ouvrage de gynécologie de référence à la fin du Moyen-Âge. Il est traduit en plusieurs langues d'Europe, de l'Italie à l'Irlande, de l'Espagne à la Pologne.


Biographie

Biographie


On sait peu de chose de sa vie. Célèbre pour sa beauté, Trotula enseigna à Salerne et y dirigea même l'école de médecine, en étant qualifiée de Mulier sapientissima, « Femme très savante » par les commentateurs.
Elle aurait appartenu à la famille Fruggardo (ou Ruggerio), d'où naitra un siècle plus tard le chirurgien Roger de Parme. D'autres la font appartenir à l'illustre famille des Hauteville. Elle serait mentionnée dans l'Historia ecclesiastica du chroniqueur Orderic Vital. Des témoignages plus précis indiquent que Trotula fut l'épouse de Jean Platearius l'Ancien, et la mère de Mathieu Platearius et de Jean Platearius le Jeune, tous trois auteurs de traités médicaux. D'autres considèrent que ces allégations sont légendaires et ne reposent sur rien.
Son existence même, et l'attribution de ses ouvrages, restent l'objet de controverses. Plusieurs femmes de Salerne au XIIe siècle auraient porté le nom de Trota ou Trocta. On attribue alors le nom de Trotula à un ensemble de textes gynécologiques d'Italie du sud de cette période.
Dans l'un des Contes de Canterbury, Chaucer la cite dans un « livre des mauvaises épouses ». Un éditeur de Trotula, Caspar Wolf, affirma en 1566 que ces textes avaient été écrits par un homme, un esclave libéré d'une impératrice romaine.
En 1985, John F. Benton, considère que le personnage de « Dame Trot » dans l'œuvre de Chaucer est imaginaire, et que non seulement Trotula n'a jamais existée, mais aussi qu'il n'existe aucun auteur féminin des textes gynécologiques de cette période. Le problème a été entièrement repris par Monica H. Green, du courant américain d'histoire féministe, qui a entrepris de traduire et publier ces textes à partir de 1996.
Depuis les années 2000, on considère qu'elle a réellement existé, l'attribution de ses œuvres à des hommes relevant d'un effet Matilda. À l'inverse, il est également possible que ces écrits aient pu être attribués à une femme, pour leur donner plus d'autorité et d'authenticité, ou simplement pour détourner l'accusation d'avoir ignoré le tabou de l'observation des organes féminins.
Il existe plusieurs séries de textes attribués à Trotula, reconnus à différentes dates. Il existe près de 126 manuscrits en plusieurs versions différentes selon les copistes au cours des siècles, d'où des intitulés en latin différents pour une même œuvre (ayant plusieurs versions).
Trois œuvres sont distinguées, regroupées sous l'appellation « le Trotula » : le traité sur les maladies des femmes représentente le « Trotula Major », les deux autres (traitements pour les femmes et cosmétiques) constituent le « Trotula Minor ». Ces textes atteignent leur pic de popularité au XIVe siècle. Le Trotula est alors le texte gynécologique de référence de la culture médiévale tardive, de l'Italie à l'Irlande, et de l'Espagne à la Pologne.


Femmes au Moyen-Âge

Femmes au Moyen-Âge


En Europe occidentale, de l'empire Romain au XIIIe siècle, les femmes comme les hommes pouvaient pratiquer la médecine et la chirurgie ; et la pratique féminine ne se limitait pas aux accouchements ou au soins des femmes. Par exemple, on connait les noms de 24 femmes chirurgiennes exerçant à Naples entre 1273 et 1410, et de 15 femmes médecins à Francfort entre 1387 et 1497, la plupart sont juives et aucune n'est mentionnée comme sage-femme. Dans quelques cas, des femmes se distinguent comme des auteurs et enseignantes, écrivant en latin à partir de sources grecques et arabes.
Les femmes de Salerne étaient soumises aux traditions lombardes. La femme passe sa vie entière sous la tutelle d'un homme. Lors du mariage elle apporte sa dot et reçoit un quart des terres de son mari, mais elle ne peut utiliser ces biens qu'avec sa permission. Les différences sociales entre femmes sont importantes, avec une conscience aiguë de la noblesse. Ce contexte expliquerait les orientations des textes de Trotula : si une femme de Salerne ne choisit pas la voie religieuse, sa vie dépend de son mariage et de ses maternités sous la tutelle d'un homme ; d'où l'importance d'une cosmétique et d'une gynécologie axée sur la sexualité et la fertilité.


Citations

Citations


« Puisque donc les femmes sont par nature plus faibles que les hommes, par conséquent sont plus fréquentes chez elles les maladies, surtout dans les parties vouées à l'œuvre de la nature ; et comme ces parties se trouvent en des endroits secrets, les femmes par pudeur et fragilité de condition, n'osent pas révéler à un médecin les angoisses causées par ces maladies. C'est pourquoi émue de leurs malheurs et à l'instigation d'une certaine matrone, j'ai commencé à examiner avec attention ces maladies qui frappent très souvent le sexe féminin ».


Trotula propose des explications théoriques des différentes affections. Elles sont inspirées de celles de Galien, qui affirmait que les femmes sont plus humides et plus froides que les hommes. Incapables de « cuire » leurs aliments (les digérer correctement), elles doivent avoir leurs règles pour éliminer le surplus. La menstruation est un phénomène nécessaire de purgation, où les femmes éliminent par leurs règles ce que les hommes éliminent par leurs poils et leur barbe.
« Les menstrues que l'on appelle communément fleurs, car, de même que les arbres ne portent pas de fruits sans fleurs, de même les femmes sans fleurs sont frustrées de leur fonction de conception ».


Effet Matilda

Effet Matilda


L’effet Matilda désigne le déni ou la minimisation systématique de la contribution des femmes scientifiques à la recherche, dont le travail est souvent attribué à leurs collègues masculins.